Conférence de Guillaume G. Poirier et Philippe Blouin. Sémiotiques fantômes de l’État colonial
Le jeudi 20 juin 2024, à 17h00.
Lien vers l'événement Permalien sur Résistance Montréal
UQAM, pavillon Judith-Jasmin, local J-4935 (métro Berri)
Le G.R.A.S. (Groupe de recherche en aliénation sémiotique) et Stasis (Groupe d'enquête sur le contemporain) sont honorés d’organiser la conférence "Sémiotiques fantômes de l’État colonial. Déloger la thé(lé)ologie hobbesienne/duplessiste", présentée par Guillaume G. Poirier (PhD, études politiques, UOttawa) et Philippe Blouin (candidat au doctorat, anthropologie, McGill). Cette conférence, au temps et à l’espace distendus, nous fera circuler entre le 17e siècle et le « maintenant », la « mère patrie » et le territoire agressivement conservateur de Duplessis, pour penser les limites de la résurgence de l’État colonial, entre sémiotique et aliénation.
Vous serez chaleureusement attendus au local J-4935 à l’UQAM (Pavillon Judith-Jasmin) le 20 juin prochain, de 5 à 7.
Nourritures aimables et boissons de qualité seront servies.
***
Voir ci-bas : les présentations complètes des contenus, signées par les deux conférenciers.
***
"Civilité, sauvagerie et enfer: les jeux de frontières et d'absorption dans l'imagerie de l'État de Thomas Hobbes"
Guillaume G. Poirier
En prenant comme point de départ mon statut d'aliène face à la discipline sémiotique, je proposerai une analyse de l'iconographie de l'État souverain la plus célèbre en philosophie politique, soit celle de Thomas Hobbes. Dans cette iconographie, il s'agira d'abord de reconnaitre la présence d'un rituel de passage entre civilité et sauvagerie au cœur du contrat hobbesien. Nous verrons que cet acte de naissance du sujet politique moderne ne fait pas que dépeindre la sauvagerie d'une altérité lointaine et extérieure, en l'occurrence celle du « sauvage américain » face à laquelle se pose la « civilité » de l'Occident. Nous constaterons que la « civilité » hobbesienne devine paradoxalement cette « sauvagerie » en son propre cœur. De là l'aliénation du sujet civil hobbesien: aliénation du droit naturel originaire qui caractérise l'idée même de souveraineté, aliénation du sujet dans sa soumission absolue au pouvoir souverain, mais aussi aliénation de la « civilité » du sujet occidental qui possède en lui-même, nous dit Hobbes, un noyau sauvage. Ce trait singulier de la sémiose hobbesienne offre en ce sens une extension à la dialectique du sujet et de l'altérité. Le sujet civil ne fait pas qu'accomplir un « passage nécessaire » dans l'altérité sauvage pour s'en distinguer aussitôt. En réalité, il la pose en lui-même comme une partie qui le constitue et qu'il s'agit en même temps de conjurer. Chez Hobbes, la dépossession ne s'accomplit donc pas seulement du côté de l'altérité sauvage. Elle s'opère également du côté du sujet civil en ceci que la civilité absorbe l'altérité sauvage et la pose toujours comme une potentialité active, justifiant par-là le risque constant de la guerre civile.
À cette aliénation d'ordre « laïque », on peut également en reconnaitre une seconde d'ordre théologique. C'est que la question de la sauvagerie est aussi pour Hobbes l'occasion d'une perdition du sujet. D'une part, la « sauvagerie américaine » a longtemps été pensée dans le discours colonial comme territorialité de l'Enfer. D'autre part, le symbole même de l'État chez Hobbes, le Léviathan, est dans l'iconographie anglo-saxonne un symbole des portes de l'Enfer ou encore de son gardien. En ce sens, ce problème ambigu de l'Enfer comme étant tantôt l'Amérique elle-même, tantôt l'État colonisant son territoire, peut éclairer le problème de la double valence de la figure du « sauvage ». Si le discours colonial a toujours été traversé par les figures du noble et de l'ignoble « sauvage », on peut ainsi apercevoir d'une part le risque de cette sauvagerie infernale que l'État colonial doit conjurer. Mais on peut aussi apercevoir dans cette idylle du noble « sauvage » le signe d'un paradis perdu dont il s'agirait, pour l'État hobbesien, de retenir la venue. Après tout, si Léviathan a pour rôle à la fois d'incarner le symbole terrifiant de l'Enfer et de retenir les forces infernales afin d'assurer l'ordre et la sécurité, ne peut-on pas aussi voir dans ce gardien des portes de l'Enfer un colosse qui retient le retour du Christ? Autrement dit, peut-on voir dans la souveraineté hobbesienne une sorte de katechon colonial fonctionnant par absorption de la sauvagerie ? C'est cette valence qu'il s'agira de gloser ensemble.
***
"Démanteler le Québec comme fabrique à orphelins: comment les Mères mohawks conjurent le spectre duplessiste"
Philippe Blouin
Après avoir remporté une bataille légale bloquant des travaux à l'ancien Hôpital Royal-Victoria à Montréal pour y chercher les sépultures anonymes de victimes d'expériences médicales, les Kanien'keha:ka Kahnistensera (Mères mohawks) ont annoncé en mai 2024 qu'elles se joindraient aux Orphelins de Duplessis pour protéger les vestiges du cimetière de l'hôpital psychiatrique de St-Jean-de-Dieu, où la Société des Alcools du Québec compte construire un nouveau centre de distribution automatisé. Leur accompagnateur, l'anthropologue Philippe Blouin, raconte les déboires et les exploits de cette alliance improbable pour exorciser les squelettes du placard québécois, y trouvant l'indice d'une cure de jouvence antinationale libérant l'enfance (du "diable", libre et sauvage) du joug katéchontique qui l'a sacrifié sur l'autel sécularisé de la Nation.
Événements
dim.
8
sep.
8
sep.
Toute la journée
Bâtiment 7
Bâtiment 7
mar.
10
sep.
10
sep.
mar.
10
sep.
10
sep.
mer.
11
sep.
11
sep.
mer.
11
sep.
11
sep.
mer.
11
sep.
11
sep.
19h00
Online
Online
jeu.
12
sep.
12
sep.
jeu.
12
sep.
12
sep.
jeu.
12
sep.
12
sep.
19h00
Parc Lafontaine
Parc Lafontaine